Mlle Lenormand, surnommée « la Sybille de Paris », fut l’une des voyantes les plus célèbres du XIXe siècle. De ses débuts précoces au couvent à ses consultations auprès de figures historiques telles que Joséphine de Beauharnais, Robespierre ou encore peut-être Napoléon, elle a traversé les bouleversements de la Révolution, de l’Empire et de la Restauration sans jamais perdre sa renommée. Son don pour la divination et son flair pour l’autopromotion lui ont permis d’accéder à une notoriété exceptionnelle. Mystérieuse, redoutée, fascinante, elle a su entretenir sa légende à coups de prédictions marquantes et d’ouvrages publiés. Son enterrement, grandiose, a réuni tout Paris, y compris Balzac et Hugo. Entre vérité historique et mythe savamment entretenu, Mlle Lenormand reste une figure à part. Encore aujourd’hui, sa tombe au Père Lachaise attire les curieux. Une femme libre, singulière, et une vie digne d’un roman.

Le 27 juin 1843, en début de soirée, le Tout-Paris se presse pour des obsèques des plus particulières dans le 5e arrondissement de la capitale. Du plus petit marchand au plus misérable manant, de la jeune fille de la haute bourgeoisie au ministre Guizot, tous et toutes toisent un cercueil somptueux, composé du plus beau bois, sous l’aplomb d’une farandole d’émotions.

Parmi les témoins de cette scène, les grands romanciers Honoré de Balzac et Victor Hugo. Un tel regroupement populaire, mêlant les grands hommes du temps et les anonymes, signifie probablement qu’on enterre un ministre, un littéraire ou même un souverain. Rien de tout cela : celle qui gît dans cette boîte recouverte d’une immense couverture de soie est une voyante. Mais pas n’importe laquelle : il s’agit de Mlle Lenormand, la voyante la plus célèbre du pays. Et ses prédictions, encore aujourd’hui, poursuivent la mémoire des Hommes.

Dans la mort comme dans la vie, Marie-Anne Lenormand ne semble être qu’un immense et impénétrable mystère. D’après les rumeurs, elle aurait annoncé sur son lit de mort qu’en 1914, les Hommes voyageraient dans le ciel, mais aussi que le monde serait à feu et à sang. Mais Balzac et Hugo n’étaient évidemment plus de ce monde pour confirmer ces étranges prédictions.

Balzac la connaissait seulement de nom, de réputation. Jamais il n’a eu l’occasion de la consulter. D’autres – et non des moindres – occupaient les salons de la septuagénaire depuis des décennies.

Paris aurait-elle donc connu une femme capable de prédire l’avènement de la Première Guerre mondiale, près d’un siècle avant les faits ? Pour démêler le vrai du faux et se confronter à cette cartomancienne, il faut remonter à l’enfance de Marie-Anne Lenormand.

Née à Alençon en 1772, elle porte le même prénom que la première fille de son père drapier, disparue en bas âge. Déjà, le lien entre notre héroïne et l’au-delà se tisse.

Aux heures les plus troublées de la Terreur à Paris, Marie-Anne Lenormand se retrouve à fréquenter une certaine Joséphine de Beauharnais, qui deviendra la première impératrice des Français. Et c’est l’avènement de Napoléon qui va lui permettre de gagner des galons supplémentaires. En effet, la correspondance qui démarre entre Joséphine et Mademoiselle Lenormand se transforme en véritable amitié partagée. D’ailleurs, la rumeur dit que la voyante a même reçu en consultation, durant la Révolution, le jeune général Bonaparte.

Alors que le Directoire bat de l’aile, et que l’ombre de Napoléon plane déjà sur le destin de la nation, la prophétesse devient la personne de référence en matière divinatoire dans la capitale. Mais la diseuse de bonne aventure a-t-elle réussi à maîtriser la suite de son destin ? Comment a-t-elle acquis une renommée qui a amené le Tout-Paris à se rendre à ses funérailles ? A-t-elle vraiment prédit correctement l’avenir des grands de son époque ? Tirez les cartes dans ce podcast de L’Heure H où tout est une invitation au mystère et à la légende.