Lorsque aimer la nature se conjugue avec habiter en ville, il arrive que des citadins profitent du moindre espace libre pour y jeter des graines, pour le plaisir de les voir s’enraciner et croître. Semer pour résister à l’envahissement du béton. C’est la rose trémière qui a leur faveur. Cette belle élancée fleurit inlassablement. Aussi peu exigeante que généreuse, elle s’adapte parfaitement au sol ingrat des villes. Anouk, Françoise et Nelly, jardinières sans jardin, pratiquent avec bonheur le fleurissement sauvage, chacune pour des raisons différentes, chacune à leur manière, mais toujours par amour des plantes et peut-être aussi pour savourer ce goût de liberté que donne l’appropriation d’espaces publics négligés qu’une végétation non planifiée par les services municipaux métamorphose. Même dans un environnement hostile, la nature est incroyablement prolifique et il suffit parfois de presque rien pour qu’elle s’installe et s’épanouisse, c’est ce qu’Imane a découvert, à force de patience et de conviction, dans un potager collectif installé sur une dalle de béton. Depuis plus de 30 ans, Maurice est le pionnier en Suisse de ce qu’on appelle la « guerilla gardening » mais qu’il préfère décrire comme graffiti avec des fleurs ou anarchie florale. Aujourd’hui, après avoir essaimé ses compositions florales dans toute la ville de Zurich, il aspire à une cité où l’on puisse pratiquer la cueillette, une ville plus comestible et plante, sans autorisation, des arbres fruitiers. Pour Anouk, Imane, Françoise, Nelly et Maurice, la ville est leur jardin. Ils sèment pour résister. Libres semeurs, libres penseurs. Un documentaire de Nicole Weyer pour Passe-moi les jumelles.