Depuis le début de cette année, la France est ébranlée par un courant puissant de dénonciation de l’inceste, dans le fil du mouvement MeToo. Le livre de Camille Kouchner, La Familia Grande, dans lequel elle dénonce des abus sexuels contre son frère jumeau, commis par son beau-père le politologue Olivier Duhamel, a libéré la parole. Immense personnalité intellectuelle, Duhamel a reconnu les faits et l’instruction suit son cours. En Suisse romande également, vous allez le voir, les victimes d’inceste dans leur enfance osent enfin parler. Dans le reportage que nous vous proposons, signé Laurence Gemperle et Frank Preiswerk, vous allez entendre le témoignage de Sarah Briguet, ex-miss suisse, et elle-même victime des abus sexuels de son père dès l’âge de 7 ans. Pour la première fois, d’autres femmes ont accepté de témoigner devant notre caméra. Certaines sont très jeunes, comme Claire, 16 ans, ou Chloé 22 ans. Pour autant, chez nos témoins plus âgés, Marie et Michèle, la marque de l’inceste est indélébile et elle a imprimé un traumatisme qu’une vie ne suffit pas à effacer. L’inceste « ça vous tue et il faut qu’on vive », dit une des femmes qui s’est confiée à notre équipe. La dépression, le suicide, sont à tous les carrefours des victimes de l’inceste. La clé, la seule clé pour s’en sortir, c’est la libération de la parole, de ce secret si lourd à porter et qui ronge de l’intérieur. Mais vous allez le comprendre, parler de l’inceste, faire sortir la souffrance et la rage intérieure, dénoncer ses parents en justice, c’est un effort parfois insurmontable. Un mot encore sur la procédure judiciaire entamée par Sarah Briguet contre son père, pour des abus sexuels commis dans son entourage. La décision vient de tomber il y a quelques jours : il a été reconnu coupable par le Ministère public valaisan d’actes sexuels avec des enfants et condamné à 180 jours de prison avec un sursis de trois ans. Le jugement sera exécutoire d’ici demain (28.05.2021), date limite pour le dépôt d’un recours. Un reportage de Laurence Gemperle et Frank Preiswerk.