
Joseph Smith, fondateur du mouvement mormon, a profondément marqué le paysage religieux des États-Unis au XIXe siècle. Dans une Amérique en pleine mutation – où les tensions sociales, les changements économiques et les questionnements spirituels se multipliaient – Smith a émergé comme une figure charismatique et visionnaire.
En proposant une nouvelle lecture du christianisme à travers le mormonisme, il a non seulement rassemblé des fidèles autour d’une foi inédite, mais a également influencé durablement l’identité religieuse américaine.
Résumé des points abordés
- Une jeunesse au cœur du renouveau spirituel américain
- L’étrange découverte des plaques d’or et la naissance d’un nouveau canon
- Le Livre de Mormon : un texte fondateur aux résonances américaines
- La création d’une Église aux ambitions théocratiques
- Joseph Smith, prophète, maire… et candidat à la présidence
- Un héritage spirituel mondialement reconnu
- Conclusion : Une révolution spirituelle profondément américaine
Une jeunesse au cœur du renouveau spirituel américain
Né en 1805 dans le nord de l’État de New York, Joseph Smith a grandi dans une région imprégnée par le « Second Grand Réveil », un courant de renouveau religieux qui a bouleversé la société américaine.
Cette atmosphère fervente, marquée par des prêches enflammés et une recherche collective du sens, a nourri son imaginaire et préparé le terreau de sa propre révolution spirituelle.
Cette époque fut marquée par :
- La prolifération des confessions chrétiennes
- Un désir accru d’expériences spirituelles directes
- Un rejet des institutions religieuses traditionnelles
- L’émergence de prédicateurs itinérants et de sectes novatrices
À seulement quinze ans, Joseph Smith déclara avoir reçu une vision céleste au cours de laquelle Dieu le Père et Jésus-Christ lui seraient apparus. Cette expérience mystique, qu’il décrivit comme le point de départ de sa mission divine, marqua une rupture radicale avec le christianisme établi.
L’étrange découverte des plaques d’or et la naissance d’un nouveau canon
En 1823, Smith rapporta avoir été visité par un être angélique nommé Moroni, qui le guida vers un ensemble de plaques d’or cachées sur une colline proche de son domicile. Selon lui, ces plaques contenaient l’histoire d’anciennes civilisations américaines en lien avec les enseignements du Christ.
« Ce récit mystique de la traduction des plaques d’or a suscité fascination et scepticisme dès son origine, illustrant la tension entre foi et rationalité. »
Avec l’aide d’un instrument qu’il décrivit comme divinement inspiré, il traduisit ce texte en anglais, donnant naissance au Livre de Mormon, une œuvre qui deviendrait le socle doctrinal du mormonisme.
Cette nouvelle écriture s’ajoutait au canon chrétien existant, en élargissant la portée géographique et théologique du message du Christ.
Le Livre de Mormon : un texte fondateur aux résonances américaines
Ce nouveau texte sacré, publié en 1830, apportait une vision originale de l’histoire spirituelle des Amériques. Il mettait en scène des peuples anciens supposément originaires de Jérusalem, venus s’établir sur le continent américain bien avant l’arrivée des Européens.
Le Livre de Mormon se distingue par :
- Une narration épique enracinée dans le Nouveau Monde
- Des références constantes à Jésus-Christ
- Une conception providentialiste des États-Unis
- Un style biblique adapté au contexte américain
En ancrant le récit religieux dans les terres américaines, Smith renforçait l’idée que la destinée spirituelle des États-Unis était inscrite dans le plan divin. Le texte posait ainsi les bases d’une théologie nationale, où les Américains étaient perçus comme les héritiers d’un héritage sacré.
La création d’une Église aux ambitions théocratiques
La fondation officielle de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours eut lieu la même année que la publication du Livre de Mormon.
Très vite, Smith et ses fidèles durent faire face à des persécutions, contraignant le groupe à migrer de ville en ville, de New York à l’Ohio, puis vers le Missouri, avant de s’installer à Nauvoo, dans l’Illinois.
« Nauvoo devint rapidement l’une des plus grandes villes de l’Illinois, symbole de la capacité des mormons à bâtir des sociétés organisées et visionnaires en milieu hostile. »
Sous la direction de Smith, ces communautés prirent la forme de véritables expérimentations sociales, où religion et politique se mêlaient étroitement.
L’organisation économique reposait sur des principes de mise en commun des biens, tandis que le pouvoir spirituel détenu par le prophète se prolongeait dans la gouvernance quotidienne.
Joseph Smith, prophète, maire… et candidat à la présidence
En plus d’être un chef religieux, Joseph Smith se lança activement dans la vie politique. Il fut élu maire de Nauvoo, où il mit en place un code municipal unique et une milice locale indépendante, ce qui renforça encore la méfiance des autorités extérieures.
En 1844, Joseph Smith alla jusqu’à :
- Se déclarer candidat à la présidence des États-Unis
- Proposer une réforme radicale de la Constitution
- Appeler à une théocratie démocratique
- Plaider pour la fin de l’esclavage
Son activisme politique, couplé à l’introduction de pratiques comme la polygamie, fit de lui une figure controversée et redoutée. Les tensions culminèrent cette même année lorsqu’il fut arrêté, puis assassiné par une foule en colère dans une prison de l’Illinois.
Un héritage spirituel mondialement reconnu
La mort de Joseph Smith n’a pas mis un terme à l’histoire du mormonisme. Au contraire, son successeur Brigham Young conduisit les fidèles vers l’Utah, où ils établirent Salt Lake City, centre névralgique du mouvement.
Aujourd’hui, l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours compte des millions de membres dans le monde entier.
« En 2025, l’Église recensait plus de 17 millions d’adeptes répartis sur tous les continents, avec des missions actives dans plus de 160 pays. »
L’influence de Joseph Smith dépasse largement le cercle des croyants. Il a redéfini la relation entre individu et révélation, démontrant qu’une foi personnelle pouvait aboutir à la fondation d’une religion entière.
Son œuvre continue d’alimenter des débats sur la nature de la vérité religieuse, la frontière entre foi et fiction, et le rôle de la spiritualité dans l’espace public.
Conclusion : Une révolution spirituelle profondément américaine
Joseph Smith n’a pas seulement créé une nouvelle religion, il a initié un mouvement aux ramifications multiples – spirituelles, sociales et politiques.
En affirmant qu’une nouvelle révélation pouvait s’ajouter aux Écritures, il a secoué les fondements mêmes du christianisme traditionnel. En organisant ses fidèles en communautés autonomes et en défendant des pratiques audacieuses, il a ouvert une voie inédite vers une société religieuse alternative.
Son nom reste associé à l’idée que la foi peut transformer le monde, et que l’Amérique du XIXe siècle fut non seulement une terre d’exil, mais aussi un terreau d’inventions spirituelles. Joseph Smith fut bien plus qu’un prophète : il fut l’un des grands architectes de la religiosité moderne en Amérique.