11 décembre 1985, Hugh Scrutton s’affaire dans son magasin d’informatique. Il trie ses factures, archive ses bons de commande. Il se laisse facilement déborder par cet amas de feuilles annotées lorsque, sur son parking, il aperçoit un homme un peu bizarre, qui porte des lunettes de soleil et une capuche. Le type s’avance tout près du magasin, l’air décidé, un colis sous le bras. Un livreur ?

C’est tout de même bizarre. Il ne porte pas un carton mais une espèce de caisse en bois. Le temps qu’il sorte de derrière son comptoir pour voir ce qu’il en retourne, l’homme à capuche, comme un fantôme, a disparu derrière les voitures du parking. a caisse de bois, immobile, trône devant son magasin. Le propriétaire du magasin attrape la caisse entre ses immenses bras. Il ne se méfie pas. L’homme tente d’ouvrir la boîte qu’il tient entre ses mains. Elle n’est pas encore totalement déballée qu’elle explose. Une bombe. Artisanale. Sur le parking, dans le magasin et aux alentours, une déflagration monumentale saisit de terreur les passants et les automobilistes.

Les forces de l’ordre locales contactent le FBI. L’agence n’est pas surprise par ce qui a été retrouvé sur les lieux du crime. Ce mec qui a posé la bombe, les agents du FBI le connaissent bien. Ils sont sur ses traces depuis des années déjà. Toujours pas de témoin, un poseur d’engin explosif qui apparaît et disparaît comme par magie et surtout, pour la toute première fois, un mort. Le criminel se perfectionne. Développe dorénavant des machines qui sont létales. Ted Kaczynski, alias UNABOMBER, n’a qu’un mobile : celui de haïr les avantages qu’apportent les avancées technologiques, et de refuser de vivre dans le monde moderne. Un tueur d’un genre totalement particulier.

C’est lorsqu’il sort des études que la dimension idéologique de son parcours va prendre toute son importance. Une dualité terrible s’immisce en lui. D’un côté, face à un monde qu’il estime injuste et cruel, il voudrait opposer une lutte révolutionnaire capable de renverser le système. De l’autre, une haine terrible, due à la position sociale qui est la sienne l’empêcherait de toute façon d’endosser un rôle de leader pour mener ses troupes au combat. Une prise de conscience qui le pousse dans la radicalité.

C’est dans sa cabane qu’il fabrique sa première bombe artisanale. Habité par l’enjeu qui est le sien, Kaczynski s’apprête à tuer. À distance. C’est là toute sa particularité : il est de ces tueurs qui ne regarderont jamais leurs victimes dans les yeux. Sa première cible est un professeur d’université, Buckley Crist, qui donne cours dans l’Illinois. C’est une célébrité de l’État, et Kaczynski, lui, veut se servir de son nom pour faire passer son message, et déployer son irrépressible force vengeresse. Le jeune homme se prépare depuis des mois, et même s’il est déterminé comme jamais au moment de passer à l’acte, sa connaissance des explosifs laisse encore à désirer. Ses dosages sont parfois un peu trop approximatifs, manquent de rigueur et de précision. Les mains tremblantes, il referme son engin avec le sentiment du devoir accompli.

On retrouve la bombe sur un parking de l’université de Chicago. Sur l’emballage figurent les coordonnées de la cible comme adresse de retour. Machinalement, lorsqu’il ouvre sa boîte aux lettres et y découvre le paquet, le professeur Crist, la clé de la porte dans la main, est surpris. C’est bizarre. Ce colis, il ne l’a jamais envoyé. Cette écriture sur le dessus, ce n’est pas la sienne. Taraudé par le doute qui l’assaille, l’universitaire appelle la police. Un membre des forces de l’ordre, sans précaution, ouvre le carton. Heureusement pour ce dernier, la bombe n’a pas été assez chargée. Pas de victime pour cette fois. Le même type de scénario va se répéter durant des années, jusqu’au meurtre d’Hugh Scrutton. Et celui-ci ne sera pas le dernier. Quelles ont été les autres victimes ? Comment ce tueur anonyme a-t-il fini par être arrêté par le FBI ? Remontez le fil des événements dans ce podcast de L’Heure H.