Comprendre et décrire une couleur peut s’avérer une tâche complexe, en raison de sa nature variable. En effet, une couleur peut nous apparaître différemment en fonction de nombreux facteurs tels que le contraste, la lumière, ou encore la matière de l’objet coloré. Cette perception subjective de la couleur nous amène à une question intrigante : comment pouvons-nous concevoir le fait que certaines personnes ne sont pas en mesure de voir certaines couleurs ?
La dyschromatopsie, plus communément appelée daltonisme, est une maladie génétique caractérisée par des irrégularités dans la perception des couleurs. Ce terme provient de John Dalton, un chimiste britannique du XVIIIe siècle, qui a rédigé un article sur la perception des couleurs, et qui a lui-même souffert de cette affection. Selon les statistiques mondiales, environ 8% des hommes et 0,4% des femmes sont atteints de dyschromatopsie.
Penchons-nous sur le mécanisme complexe de la vision des couleurs
La rétine de l’œil humain est composée de deux types de cellules : les cônes et les bâtonnets. Le rapport entre ces deux types de cellules est assez impressionnant, avec environ 6 millions de cônes pour 120 millions de bâtonnets. Les bâtonnets sont responsables de la transmission des informations liées à l’intensité lumineuse au cerveau, tandis que les cônes sont impliqués dans la perception des couleurs. Il existe trois types de cônes, chacun ayant une sensibilité spécifique :
- Les cônes L sont sensibles au rouge.
- Les cônes M réagissent au vert.
- Les cônes S perçoivent le bleu.
Chacun de ces cônes contient un pigment coloré spécifique qui est capable de capter une certaine longueur d’onde.
La couleur et sa relation avec la génétique sont également fascinantes
Il existe trois pigments distincts correspondant aux trois types de cônes. Les gènes responsables de la production du pigment rouge et du pigment vert se situent tous deux sur le chromosome X, un des chromosomes sexuels. Ils sont très proches l’un de l’autre sur ce chromosome, ce qui a deux implications principales :
- L’anomalie de perception du rouge et du vert est presque exclusivement masculine. En effet, les hommes n’ont qu’un seul chromosome X, donc si l’anomalie est présente, elle s’exprimera inévitablement. Les femmes, en revanche, possèdent deux chromosomes X et peuvent donc être porteuses de l’anomalie sans nécessairement la manifester.
- Cette anomalie est presque exclusivement transmise par la mère. Un homme daltonien ne peut pas avoir de fils daltonien, car il lui transmet son chromosome Y. Cependant, sa fille peut être une porteuse saine, car elle recevra le chromosome X affecté de son père et un chromosome X sain de sa mère.
Concernant le gène du pigment qui permet la perception du bleu, il est situé sur le chromosome 7. Cette anomalie peut affecter aussi bien les hommes que les femmes, mais elle est beaucoup plus rare.
Il existe plusieurs formes de daltonisme
- La Monochromie est une insensibilité totale aux trois couleurs. C’est une forme extrêmement rare, qui affecte une personne sur 40 000. Les personnes atteintes voient le monde uniquement en nuances de gris, car aucun pigment n’est présent dans les cellules à l’arrière de l’œil.
- La Dichromie se caractérise par une insensibilité à une couleur, les deux autres étant normalement perçues. Dans ce cas, un seul des trois pigments ne s’exprime pas.
- La Trichromie anormale est une condition où la perception des trois couleurs est altérée à différents degrés. Cela rend certaines teintes intermédiaires difficiles à discerner. Dans ce cas, les pigments sont présents dans les cônes, mais un ou plusieurs de ces pigments ont une sensibilité différente de la normale.
Malgré les avancées de la science, l’évaluation précise du daltonisme reste un défi. Il est cependant possible de le détecter grâce au célèbre test de pastilles colorées développé par Shinobu Ishihara en 1917. Bien qu’il n’existe pas de traitement définitif, les personnes atteintes de daltonisme ont vu une lueur d’espoir en 1971 avec le développement d’une lentille appelée X-Chrome. Cette lentille rouge, portée sur un seul œil, permet à la personne de mieux différencier les couleurs en comparant la vision de ses deux yeux.