C’est une profession en voie de disparition – le transport par flottage de trains de bois vers les grandes scieries en aval de la rivière. Aujourd’hui, il ne reste pratiquement plus aucun endroit du globe qui ne soit accessible par camion. En Norvège, le dernier draveur s’est retiré de la rivière il y a un an, aux États-Unis l’année précédente. Mais ces hommes agiles qui flottent avec le courant au sommet des troncs d’arbres, tirés uniquement par un petit remorqueur, existent toujours. Sur le fleuve Fraser, en Colombie-Britannique, sur la côte ouest du Canada, le transport par flottage reste encore aujourd’hui une activité rentable. Le Canada également compte très peu de draveurs, et le flottage ne se fait plus aujourd’hui que sur le fleuve Fraser, dans la province de Colombie-Britannique. Ce fleuve prend sa source dans les Rocheuses et traverse le pays sur environ 1 400 kilomètres, avant de se jeter dans le Pacifique près de Vancouver. Le capitaine Berry Higgs et son matelot Jo sont tous les jours sur le terrain, aidés de leur petit mais puissant remorqueur. Celui-ci peut acheminer aux scieries de gigantesques radeaux de bois, longs parfois de plus de deux kilomètres. Berry est propriétaire de sa propre entreprise, Hodder Tugs, depuis plus de 30 ans. Ses yeux s’illuminent lorsqu’il évoque ses aventures de jeune homme : le fleuve était autrefois beaucoup plus fréquenté et, avant l’invention du téléphone portable, les marins disparaissaient souvent avec leurs bateaux dans le nord du Canada pendant des semaines. Ils ne revenaient sur le fleuve Fraser que lorsqu’ils avaient rassemblé suffisamment de bois pour former un énorme radeau, qu’ils tiraient alors jusqu’aux scieries. Aujourd’hui, la rapidité est de mise. Berry a un téléphone, une radio et un fax à bord, et les remorqueurs restent généralement sur le fleuve pour répartir entre les scieries le bois livré par de gros navires. La mondialisation est un véritable défi : chaque année, des scieries le long du fleuve Fraser ferment leurs portes. Cela signifie moins de travail pour les expéditeurs, déjà accablés par les bas prix qu’ils doivent offrir pour rester en activité. Les temps sont durs pour les derniers draveurs. La guerre des prix est une lutte quotidienne pour Berry et ses collègues – « le temps, c’est de l’argent » est la devise sous laquelle ils travaillent. Les équipages sont souvent transportés par hydravion lors des changements de quart, afin que les bateaux et leurs hommes puissent être déployés le plus efficacement possible. Malgré l’énorme pression, ils doivent s’assurer que les personnes, les bateaux et les radeaux arrivent à bon port. Naviguer sur le Fraser n’est pas une tâche facile : les longs radeaux doivent être manœuvrés sous des ponts étroits, devant des sites industriels, des zones habitées et à travers les impressionnantes étendues sauvages. Mais Berry n’échangerait son travail pour rien au monde. Il aime la liberté d’être sur l’eau. Sur le pont, face à un vent mordant, une cigarette au coin de la bouche, à la barre des énormes radeaux de bois tirés par son remorqueur, il est pleinement heureux. Un documentaire de Kristian Kähler.