De l’Autriche de l’après-guerre à l’arène politique américaine en passant par Hollywood, la « success story » hors norme du « Governator » symbolise le mythe américain du XXIe siècle, entre rêve et cauchemar. Arnold Schwarzenegger, ou le self made surhomme. Comment l’adolescent gracile qui grandit dans l’Autriche post Seconde Guerre mondiale est-il devenu le Terminator aux muscles hypertrophiés qui s’apprête pour la sixième fois à conquérir les écrans du monde, et en 2003, puis 2006, le « Governator » républicain adulé de l’État le plus peuplé d’Amérique, la Californie ? Au début des années 1980, quand le bodybuilder, grâce à Conan le barbare, puis au premier Terminator, se hisse au sommet du box-office, on s’étonne encore de son physique aberrant, de son accent brutal et du patronyme imprononçable qu’il a choisi de garder contre l’avis des studios. Près de quarante ans après, la planète entière a appris à dire « Arnold Schwarzenegger », ce nom représentant « le rêve américain en cuir et en os », comme « Schwarzie » lui-même aime à le rappeler. Mais celui qui a remporté cinq titres de Mister Univers, dont le premier à 21 ans, a fait davantage que réinventer son propre corps : il a su, à force de patience et de détermination, sculpter le réel à l’image de son rêve d’enfant. Avec d’abondantes archives, dont nombre d’interviews hautes en couleur de l’intéressé, ce documentaire retrace l’irrésistible ascension d’Arnold Schwarzenegger à la lumière d’une séduisante hypothèse : comme Terminator, ce robot si humain qu’il ne cesse de faire revivre, la star incarnerait notre futur en gestation. Alors que les médias n’en finissent plus d’annoncer notre devenir cyborg, Donald Trump siège à la Maison-Blanche et la réalité semble avoir basculé pour de bon dans le spectacle. L’histoire de cet indestructible septuagénaire est aussi celle d’une époque gouvernée par la loi des images, fascinée comme jamais par le culte de la volonté, pressée d’en finir avec l’humanité pour lui substituer le règne des machines. Un documentaire de Jérôme Momcilovic et Camille Juza.