Le littoral picard est un terrain d’étude particulièrement captivant pour les paysagistes et les géographes. En effet, les stratégies d’aménagements n’y sont qu’affrontements : la baie de Somme se comble inexorablement et les pouvoirs publics investissent pour le maintien de son caractère maritime tandis que la digue des bas-champs de Cayeux, espace de la présente étude, est consolidée à grands coûts alors que la mer est naturellement amenée à les réoccuper depuis le XVIIIe siècle. Depuis près de trois siècles en effet, l’Homme tente de soustraire définitivement ces bas-champs à l’élément marin. Une inondation importante, survenue au cours de l’hiver 1990, a incité à poursuivre de plus bel dans cette voie alors que s’offrait là une occasion de « dépoldérisation accidentelle ». Pourtant, à la lumière de nouveaux enjeux récemment mis en évidence (urbains, économiques, sociopolitiques, physiques et paysagers…) les mentalités des « décideurs » semblent changer. On paraît davantage prêt à considérer la mer non plus comme un danger mais comme une opportunité. Aussi cette réflexion a abouti à esquisser un projet innovant de dépoldérisation. Celui-ci propose à la fois de ne pas altérer les espaces les plus riches en termes de patrimoine (écologique, culturel) tout en se concentrant sur le point essentiel : la protection de Cayeux et des quelques zones habitées des bas-champs qui pourront dorénavant faire partie intégrante d’un territoire maritime, avec la mise en place d’un « village flottant » et d’une nouvelle économie territoriale issue de la formation de nouveaux paysages littoraux.