Albert Camus et l’absurdité de l’existence

L’éminent écrivain et penseur Albert Camus s’est illustré à travers une multitude de genres littéraires, du théâtre aux essais en passant par les romans et la poésie. Son œuvre, riche et variée, est marquée par une constante : le thème de l’absurde.

À travers ses écrits, Camus, le philosophe, l’humaniste, explore et questionne la condition humaine. Plongeons dans le parcours et les idées d’un des plus grands écrivains du XXe siècle.

Albert Camus, un aperçu biographique

Albert Camus, figure éminente de la littérature et de la philosophie du XXe siècle, voit le jour le 7 novembre 1913 à Mondovi en Algérie. Après la mort de son père, tué lors de la bataille de la Marne, il est élevé par sa mère et sa grand-mère.

Ses études à Alger révèlent rapidement son don pour l’écriture, malgré les difficultés socio-économiques qu’il rencontre. En 1930, une tuberculose le contraint à abandonner le sport. Il épouse Simone Hié et, en 1937, il fonde le Théâtre du Travail à Alger.

Il accède au poste de rédacteur en chef du journal l’Alger Républicain, qui sera interdit par le gouvernement en 1940. La même année, il s’installe à Paris et travaille comme secrétaire de rédaction à Paris-Soir. Il entame son « cycle de l’absurde » avec la publication de L’Étranger et du Mythe de Sisyphe en 1942.

Engagé, il prend position contre les horreurs de la guerre, y compris l’usage de l’arme atomique. Son roman La Peste, paru en 1947, rencontre un succès littéraire, suivi de près par Les Justes en 1949.

Son engagement politique est cependant source de discorde. Albert Camus est fortement critiqué par certains de ses amis, y compris Jean-Paul Sartre, avec qui il rompt. En 1956, alors qu’il prône la paix en pleine guerre d’indépendance algérienne, il reçoit des menaces de mort. Les Algériens lui reprochent de ne pas avoir soutenu l’indépendance. Sous protection, il quitte Alger.

Deux ans plus tard, il exprimera son opposition à l’indépendance de l’Algérie, préconisant la fin du système colonial mais souhaitant que l’Algérie reste française. Avec La Chute, il livre peut-être son œuvre la plus pessimiste, critiquant l’existentialisme.

En 1957, il est honoré du prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre.

Il décède tragiquement dans un accident de voiture avec son ami Michel Gallimard, le 4 janvier 1960. Il est inhumé à Lourmarin, dans le Lubéron.

La notion d’absurde

Albert Camus est engagé dans un combat contre l’absurdité de la vie. L’absurde, selon lui, est le fait pour un homme de ne pas connaître sa véritable nature et son but.

Cet homme vit dans un monde qui ne lui offre aucune réponse claire. Les religions, qui tentent de définir l’homme et son origine, ne parviennent pas à satisfaire l’homme absurde. Celui-ci cherche des réponses humaines, compréhensibles, ancrées dans sa réalité.

En revanche, l’homme absurde doit se détourner des images de l’enfer ou du paradis créées par d’autres. Il doit se fier uniquement à ce qui est certain. Si la quête de sens ou l’abandon de cette quête ne lui conviennent pas, il se retrouve face à l’absurdité de la mort, qui rend vains les objectifs et les projets que l’homme se fixe pour donner du sens à sa vie. L’homme absurde de Camus vit dans le présent et ne pense pas à l’avenir.

L’absurde est une énigme qui ne demande pas de réponse. L’absurde, c’est la vie, la passion. Albert Camus développe la théorie de l’absurde dans son essai Le Mythe de Sisyphe. Dans ce récit, Sisyphe, héros de la mythologie grecque condamné à pousser éternellement un rocher au sommet d’une montagne, est décrit par Camus comme heureux d’accomplir sa tâche. Sisyphe démontre qu’il faut vivre sa vie en reconnaissant son absurdité, sans pouvoir espérer plus en raison de notre condition.

Albert Camus et son plaidoyer pour la révolte

L’absurde est puissant. Et cette énergie est incarnée dans ce que Camus appelle la révolte. Camus développe cette théorie dans son œuvre, L’Homme révolté, publié en 1951. Selon Camus, la révolte est le meilleur moyen de vivre l’absurdité de la vie. C’est dire « non », mais ne jamais abandonner. C’est affronter son destin, ne pas opter pour les facilités que sont le suicide et la croyance.

En effet, se donner la mort est une façon d’échapper à l’absurdité de sa condition. De même, croire en une religion, c’est refuser la vérité, se détourner des véritables malheurs qui rongent l’humanité.

La révolte, en revanche, libère l’homme des contraintes qu’il s’impose en envisageant l’avenir. Plus il vit dans le présent, plus sa liberté s’accroît. L’homme absurde de Camus est conscient de n’avoir aucun but en soi. Il est le maître de sa vie. Mais tout n’est pas permis à l’homme absurde.

Camus, en tant qu’humaniste, imagine des hommes solidaires et complices, qui vivraient dans une collectivité juste. La révolte d’un homme sert tous ses semblables : « Je me révolte donc nous sommes », écrit Albert Camus.

La tyrannie et la servitude n’existeraient plus. La révolte ne se pose pas contre la justice et la morale, mais contre la mort et le destin. L’homme absurde ne fait preuve ni de haine ni de mépris. Au contraire, dire « non » et se révolter engendre des valeurs, de l’espoir, la liberté, tout ce qu’Albert Camus souhaitait pour notre humanité.