Tortures, meurtres, enlèvements… Les migrants retenus en Libye subissent l’enfer. Tourné sur place, ce documentaire poignant révèle un système régi par l’impunité et la collusion entre passeurs, milices et autorités, sur lequel l’Europe ferme les yeux. En Libye, des milliers de migrants venus de toute l’Afrique sont parqués dans des centres de détention aux conditions inhumaines, dans l’attente que l’Europe et l’ONU statuent sur leur sort. État sanitaire déplorable et surpopulation, travail forcé, tortures, viols, meurtres, enlèvements avec demande de rançon aux familles restées au pays ou vivant à l’étranger… : officiellement tenus par le gouvernement libyen, reconnu par la communauté internationale, ces camps sont en réalité entre les mains des milices corrompues qui contrôlent le pays. Pour elles, les migrants représentent avant tout une manne financière. En 2019, pendant la guerre civile qui a opposé les forces du gouvernement d’union nationale à l’armée du maréchal Haftar, nombre de ces détenus ont même été enrôlés de force quand d’autres étaient piégés dans ces centres, cibles stratégiques situées sur les lignes de front. Le camp de Tadjourah a ainsi été bombardé lors d’un raid aérien, un crime de guerre qui fait aujourd’hui l’objet d’une enquête de la justice internationale. Entre impuissance du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) et faiblesse ou cynisme de l’Europe, surtout préoccupée de barrer le passage aux migrants en Méditerranée, la tragédie se poursuit, alors que les garde-côtes libyens, chargés par l’UE de contenir les flux migratoires, ne disposent pas de bateaux suffisants pour rechercher et sauver les nouveaux arrivants. 

Spirale d’abus
Entièrement tourné en Libye, ce documentaire dévoile, au fil de précieux et poignants témoignages, un système régi par l’impunité et la collusion entre passeurs, milices et autorités, sur lequel l’Europe – qui verse des millions d’euros à Tripoli – ferme les yeux. Journaliste d’investigation et spécialiste des questions humanitaires, Sara Creta a obtenu des accès uniques pour documenter les violations des droits de l’homme dans les centres de détention. Elle a récupéré, entre autres, des vidéos filmées par les migrants eux-mêmes avec leur téléphone portable qui montrent leur quotidien et les abus dont ils sont victimes. Mais dans cet enfer de la détention arbitraire, son film, puissant, met aussi en lumière l’entraide et la résistance lucide, lueurs d’humanité dans le chaos.

Documentaire de Sara Creta (France, 2021, 1h01mn)

Disponible jusqu’au 11/11/2021

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