L’immense majorité des animaux vivant sur cette terre sont sauvages. Nombre d’entre eux sont régulièrement exposés à diverses sources naturelles de souffrance (intempéries, famine, sécheresse, blessures, maladies, etc.). L’éthique antispéciste implique une considération morale des intérêts de tous les êtres sentients, y compris ceux qui ne souffrent pas de notre fait, ceux dont l’espèce n’est pas en voie de disparition, ceux qui sont très éloignés de nous phylogénétiquement. La souffrance fait mal, que l’on soit humain-e, élevé-e ou sauvage. Comme pour tout être sentient, ce qui arrive aux animaux sauvages importe, car cela leur importe à eux.

Nous sommes déjà nombreux-ses à venir ponctuellement en aide à des animaux sauvages en difficulté. Mais l’idée d’organiser une assistance plus systématique aux animaux vivant dans la nature semble pour beaucoup trop compliquée, trop ambitieuse, voire impossible. Il est vrai que les pistes de solution ne sont pas immédiatement appréhendables, que nous faisons face à beaucoup d’incertitudes. En dépit de ces difficultés, un rassemblement de moyens et de volontés se met en place depuis quelques années, connu sous le nom de mouvement WAW (wild animal welfare) ou RWAS (reducing wild animal suffering).

Par une présentation du travail mené par les principales organisations composant ce mouvement (Animal Ethics, Rethink Priorities, Wild Animal Initiative), mon objectif sera de montrer que la souffrance des animaux sauvages n’est pas une fatalité. Nous pouvons, par exemple, accroître nos connaissances sur la sentience et les conditions de vie des animaux sauvages, en bâtissant des alliances avec les disciplines scientifiques pertinentes ; développer un champ disciplinaire consacré à ces questions (la biologie du bien-être) ; évaluer l’efficacité des programmes d’assistance déjà existants, les améliorer et les généraliser lorsque cela est pertinent, etc. Comme pour d’autres sujets de préoccupation, par exemple la santé humaine, nous avons plus de questions que de certitudes ; cela ne doit pas nous empêcher d’avancer. Le chantier est immense, mais nous pouvons d’ors et déjà l’investir.