Des statues édifiées à sa propre gloire par Alexandre le Grand jusqu’à l’absurdité inquiétante des fake news, un large panorama de la manipulation des foules à travers les âges. Ou comment tout pouvoir tend inévitablement à raconter des histoires.

Tout a commencé par l’art pariétal. Dans la grotte d’El Castillo, en Espagne, l’empreinte d’une main peinte au pochoir, datant de plus de quarante mille ans, figure la première création d’un symbole. La propagande – manipulation des signes et exploitation du besoin de croire – allait y trouver sa voie, se multipliant en autant de formes qu’elle connaîtrait de définitions. « Lavage de cerveau politique », « attaque délibérée contre la complexité de la pensée » ou « main invisible qui conduit à obtempérer sans en avoir conscience » pour certains historiens et spécialistes, la propagande s’ancre peut-être dans « notre capacité à rester sciemment dans l’ignorance ». Inhérente à l’idée même de pouvoir, elle serait aussi essentielle à tout État moderne. Des statues édifiées à sa propre gloire par Alexandre le Grand jusqu’à l’absurdité inquiétante des fake news, ce documentaire richement illustré défait la pelote des fabriques à histoires les plus emblématiques, nommées storytelling par les conseillers en communication d’aujourd’hui.

Illusions et contre-pouvoirs

Outre les célébrations de masse en Corée du Nord, les rumeurs distillées de part et d’autre du mur de Berlin pendant la guerre froide ou les tours de passe-passe de Donald Trump, ce documentaire évoque aussi les manipulations propres à la religion et surtout à l’art, à la fois force d’illusion et contre-pouvoir. « Tout art est propagande. Il ne s’agit pas de celle d’un État puissant, mais du cœur d’un individu », assène Ai Weiwei, le sculpteur, photographe et blogueur chinois, célèbre pour ses performances anti-establishment. Spécialistes des médias, psychanalystes, philosophes ou artistes activistes commentent avec force, archives à l’appui, les mécanismes de cet art du mensonge aussi vieux que le langage.

Documentaire de Larry Weinstein disponible jusqu’au 04/04/202.