Dans les rues poussiéreuses de Kaboul, un groupe d’enfants se presse autour d’un robinet pour remplir jerrican, bouteille ou seau. Bonnet noir vissé sur la tête, un garçonnet attend son tour. Pour tous, il se nomme Zaïd. Pour sa famille, c’est Shabina. Sitôt revenue chez elle, d’un geste vif elle libère sa longue chevelure de jais et s’empresse de redevenir une petite fille comme une autre. Ou presque. Car depuis quelques mois, pour aider son père lourdement handicapé à tenir son échoppe, ses parents ont fait d’elle une basha posh, ainsi que l’on désigne en Afghanistan « celle qui s’habille en homme ». Dans une société où les femmes demeurent des citoyennes de seconde zone – malgré quelques améliorations de leur condition depuis la chute des talibans en 2002 – et où près de 80 % des fillettes sont illettrées, le phénomène des basha posh s’est développé et amplifié. Combien sont-elles ? Une centaine ? Un millier ? Impossible de le savoir tant le sujet reste un tabou.