Partant à la recherche des enfants qu’il a immortalisés durant le siège de la capitale de la Bosnie-Herzégovine, le photojournaliste espagnol Gervasio Sánchez esquisse l’émouvant portrait d’une génération sacrifiée. À l’hiver 2019-2020, Gervasio Sánchez s’est rendu à Sarajevo dans l’espoir de retrouver les enfants qu’il avait photographiés durant l’interminable encerclement, de 1992 à 1996, de la ville par les forces serbes. En mobilisant ses contacts, qui ont diffusé les clichés sur les réseaux sociaux, et en menant des « enquêtes de voisinage », il est parvenu à identifier une poignée d’entre eux. Edo, l’ancien gamin des taudis, qui s’aventurait dans les ruines de la Bibliothèque nationale incendiée, se démène pour offrir à son fils les opportunités dont il a été privé. Alma, photographiée avec sa petite sœur sur une balançoire à bascule devant un char de l’ONU, travaille dans l’hôtellerie et estime que le conflit l’a rendue plus forte. Saisi en train de jouer au basket dans la cour de leur immeuble criblé d’impacts, Damir a intégré l’équipe nationale avant que son corps, marqué par les privations, ne lui impose une retraite prématurée. Jasmin, qui rêvait de réformer la vie politique bosnienne, n’en a retiré qu’une immense amertume. Enfin, Aljosa, qui s’amusait avec ses camarades sur des brouettes de fortune, pleure la mort de l’un d’entre eux, tué en 2009, mais aussi celle du vivre-ensemble qui animait la ville de son enfance. Ils avaient entre 5 et 15 ans lors du siège de la ville et, pour certains d’entre eux, les saisissants clichés en noir et blanc que leur offre Gervasio Sánchez demeureront les seuls témoignages visuels de leur enfance en guerre, dont le souvenir traumatique se mêle de nostalgie. Dans un Sarajevo enneigé éminemment cinématographique, ce documentaire touchant dessine le portrait d’une génération brisée, en manque de perspectives dans un pays corrompu et divisé qui n’a pas pansé ses plaies. Documentaire d’Ángel Leiro et Airy Maragall disponible jusqu’au 02/08/2021.