De 1946 à 1970, deux contes de fées se croisent et se répondent. Celui de la Nouvelle vague tchécoslovaque qui participe au dégel de son pays. Celui de l’écrivain Jan Prochazka qui mêle sa voix à celle du printemps de Prague.

Au début des années 1960 se forme la Nouvelle Vague tchécoslovaque. Un cinéma poétique qui fait émerger des réalisateurs comme Vera Chytilova, Jirí Menzel ou Milos Forman, et qui affiche une liberté toute neuve sur les écrans du monde entier. Au même moment, Jan Prochazka, jeune dirigeant d’un comité local de la jeunesse communiste, devient scénariste à la suite d’une rencontre fortuite. Son parcours croise bientôt celui de la Nouvelle Vague et change son destin artistique : alors que, jusque-là, il écrivait des récits d’enfance inspirés par le réalisme socialiste, son ton se fait plus personnel. Devenu producteur, il initie même des œuvres qui critiquent frontalement le régime. Mais le 21 août 1968, les chars soviétiques entrent à Prague et mettent brutalement fin à la parenthèse.

Pépites de cinéma
Un conte de fées tchécoslovaque brosse le portrait de ce que son narrateur nomme une « cinématographie abîmée » : l’extraordinaire période créative qu’a représentée la Nouvelle Vague tchécoslovaque, éclairée de l’intérieur par l’étonnante trajectoire d’un homme qui a utilisé sa proximité avec les instances du pouvoir pour produire plusieurs œuvres subversives. Ces deux histoires, l’une collective, l’autre individuelle, ont été stoppées net. Enfermés dans des placards bien cadenassés, les films de la jeune génération tchèque vont longtemps rester invisibles. Quant à Jan Prochazka, sacrifié sur l’autel de la normalisation soviétique, il n’a que 42 ans lorsqu’il meurt de maladie en 1971. Sa carrière brève et courageuse, qui jette un pont entre deux époques clés de l’histoire de son pays, est ici racontée par ses deux filles et plusieurs historiens. Elle ouvre une fenêtre sur un cinéma d’une grande originalité auquel ce film rend hommage à travers un montage fourmillant de pépites, éblouissantes de poésie visuelle et de liberté.

Documentaire de Christian Paigneau disponible jusqu’au 22/05/2023.