Aux Marquises, archipel flottant dans le Pacifique à mille lieues de tout continent, le tatouage était un marqueur fort d’identité. Mais avec l’arrivée des colonisateurs et des missionnaires, cette coutume ancestrale avait été bannie. Considéré aujourd’hui comme un art à part entière, le « patutiki » reconquiert les coeurs, les corps et même les visages des habitants de ces belles îles polynésiennes.

Hérauts de la renaissance de l’art du tatouage aux îles Marquises, Heretu Tetahiotupa et Teiki Huukena ont récemment fondé une école de tatouage afin de transmettre les fondements théoriques et pratiques de cette tradition. Leur travail est essentiel, car rares sont ceux qui connaissent encore la signification des motifs traditionnels. Les deux Polynésiens arpentent fréquemment la jungle de l’île de Nuku Hiva , chef-lieu de l’archipel, à la recherche de vestiges de leurs aïeux et de traces de dessins ancestraux. Vivant à l’écart de toute autre civilisation, le peuple marquisien avait créé sa propre langue et développé un système de symboles « encrés » dans la peau ou gravés dans la pierre. Ces signes énigmatiques, issus de tribus éteintes il y a bien longtemps, ont pour certains traversé les siècles et nous ouvrent les portes du passé. C’est au quatrième siècle que cet archipel du Pacifique aurait été colonisé par des marins partis de Polynésie occidentale. De nos jours, les Marquises sont rattachées à la France et à l’Union européenne, tant sur le plan économique que politique, et sont régulièrement approvisionnées par cargo. Autrefois, elles étaient contrôlées par un peuple cannibale des mers du Sud, dont les membres arboraient des tatouages sur l’ensemble du corps. Aujourd’hui, personne ne regrette la disparition de tels sacrifices. En revanche, les ornements corporels connaissent un véritable engouement. Heretu est un pionnier du mouvement qui vise à faire renaître cette pratique. Il s’est même fait tatouer le visage, comme les anciens. D’autres Marquisiens suivront-ils son exemple ? Les motifs guerriers ont-ils leur place dans la société moderne de l’archipel ?

Reportage de Luigi Maria Perotti (2022, 32mn)
Disponible jusqu’au 17/02/2023