De l’instrumentalisation des récits historiques à la réappropriation de l’histoire nationale, la guerre en Ukraine est aussi une guerre des histoires. 

Pour justifier l’invasion de l’Ukraine, le président russe Vladimir Poutine n’a cessé d’invoquer le grand-prince de Kiev, Vladimir Ier, dont la conversion, en 988, mena à la christianisation de la Russie. Il a aussi rappelé l’existence de la « Rus’ de Kiev », une principauté médiévale qui constitue la plus ancienne entité politique de la région ayant réuni les deux peuples. Alors qu’il qualifie également de “dénazification” son entreprise de conquête, son attitude montre combien l’instrumentalisation des récits historiques constitue un enjeu crucial de la guerre. Ce conflit entre deux visions radicalement opposées est vieux de plusieurs siècles. Des Vikings fondateurs de la Rus’ de Kiev aux « terres de sang » ravagées par la Seconde Guerre mondiale (la vaste zone de la Pologne centrale à la Russie occidentale qui a vu s’affronter la Wehrmacht et l’Armée rouge) en passant par le règne de la tsarine Catherine II, « impératrice de toutes les Russies », l’historiographie ukrainienne voit dans les événements du passé les effets de la longue oppression russe, et tente de se réapproprier l’histoire nationale. 

Avec notamment l’historienne et blogueuse russe dissidente Tamara Eidelman, aujourd’hui en exil et dont les vidéos totalisent des centaines de milliers de vues sur Youtube, le cinéaste ukrainien Sergei Loznitsa et sa compatriote philosophe Oksana Zaboujko, le documentariste Dirk Schneider (Zelensky, l’homme de Kiev) analyse la guerre qui fait rage à la lumière de l’histoire et de l’idéologie. Un éclairage passionnant sur ce conflit meurtrier, qui engage l’avenir de l’Europe.

Documentaire de Dirk Schneider (Allemagne, 2024, 1h30mn)
Disponible jusqu’au 12/08/2024