La vie et l’oeuvre d’Agnès Varda, contées par ceux qui la connurent au plus près. Un portrait aussi honnête qu’iconoclaste de la plus joueuse des réalisatrices, qui s’est ingéniée à fabriquer un cinéma ouvert sur le monde et sensible aux plus fragiles.

Autoproclamé “portrait libre” dès son introduction à travers la voix off facétieuse de Louis Garrel, Viva Varda ! assume d’emblée le refus de l’hagiographie à sens unique. S’il reste avant tout une ode et un hommage aussi exhaustif que possible à la force créatrice de cette cinéaste, photographe et plasticienne, disparue en 2019 à 90 ans, le documentaire ne craint pas d’évoquer sans détour, témoignages et archives caustiques à l’appui, l’intransigeance que recouvrait la bonhommie apparente de ce petit bout de femme. Sous les sourires, les danses improvisées et le ludisme érigé en art de vivre, il rappelle ainsi la radicalité sans compromis de cette pionnière de la Nouvelle Vague, qui revendiqua sa liberté dans chaque domaine de sa vie : bisexuelle assumée et mère célibataire dès les années 1950, volontiers rétive lors des interviews, et redoutable gardienne du temple de sa propre filmographie (plus de cinquante œuvres !), bien décidée à ne pas se laisser gommer par l’histoire du cinéma…

“Échange Légion d’honneur…”

“Le cinéma est un art ; par ailleurs, il est aussi une industrie.” Agnès Varda aura peut-être été la meilleure incarnation de ce mot fameux d’André Malraux. Artiste mais tout autant femme d’affaires consciente de sa dépendance envers les financiers, cette obstinée se servait résolument là où était l’argent nécessaire à ses visions poétiques : dans l’héritage d’un père industriel détesté (“Un coup de chance, mon père est mort, et il m’a laissé 2 millions !”), ou dans les poches des pouvoirs publics, sans s’embarrasser de formules de politesses (“Échange Légion d’honneur contre argent pour tourner”, envoyé par courrier au ministre de la Culture…). Si Varda faisait rire et attendrissait les plus orthodoxes des cinéphiles, elle n’en était pas moins une chef de troupe, sûre de son talent et de sa légitimité à l’exprimer sous toutes les formes. Chacun de ses films rappelle l’incroyable modernité de son univers et des questionnements qui l’habitaient, son ouverture au monde, son envie de donner la parole aux plus démunis. Racontée par ses enfants Mathieu et Rosalie, ses assistants, l’actrice Sandrine Bonnaire, les réalisatrices Patricia Mazuy et Audrey Diwan, cette intense biographie recomposée rend justice à la complexité et à la fougue de cette personnalité multiple.

Disponible jusqu’au 04/02/2024