Si la médecine nazie et ses expérimentations monstrueuses ont été partiellement jugées à Nuremberg (la plupart des coupables étaient en fuite), le rôle assigné dès 1933 par Heinrich Himmler, le maître de la SS, à l’ensemble de la communauté scientifique allemande est moins connu. Obsédé par le désir de prouver la supériorité de la race germanique, le futur maître d’œuvre de la « solution finale » crée en 1935 l’Ahnenerbe (littéralement « héritage ancestral »), institut scientifique doté de moyens colossaux pour effectuer chantiers de fouilles et expéditions à travers le monde. Si l’archéologie – dont 80 % des représentants adhèrent au parti national-socialiste – et l’anthropologie sont en première ligne, toutes les disciplines vont travailler avec ardeur à la tâche qui leur est assignée : légitimer l’entreprise d’épuration raciale, de germanisation des territoires et de domination idéologique du régime. Beaucoup de chercheurs, membres de la SS, vont aussi participer directement aux crimes de masse du nazisme, soit au sein des commandos d’extermination sur le front de l’Est, soit en se livrant à des expériences barbares sur des humains, ou encore en organisant le pillage à grande échelle des territoires conquis.