En décembre 2002, le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy, décide de fermer le centre de Sangatte qui accueille près de 2000 clandestins par jour, et qui selon lui, crée un « appel d’air ».
Quatre ans après, les migrants affluent toujours vers Calais. Chaque jour, entre 150 et 400 hommes, femmes et enfants, essayent de traverser la Manche pour rejoindre l’Angleterre. Pendant 3 semaines, nous avons suivi le quotidien de Mohamed, un infirmier pakistanais de 30 ans. Des conditions de vie très précaires : Mohamed vit dans la « jungle », un bois situé à 3km du centre ville de Calais.
Toutes les nuits, Mohamed tente sa chance. Son voyage du Pakistan à la France lui a déjà coûté 10 000€ et il devra débourser encore 1200€ pour atteindre l’Eldorado anglais. En attendant, il faut survivre.
Malgré la présence d’associations de bénévoles, se nourrir, se laver, représente pour lui, comme pour les autres, un défi quotidien. Il partage sa cabane construite avec des branches et des couvertures, avec trois autres compatriotes non-expulsables comme lui car leur pays d’origine (Irak, Iran, Pakistan…) refuse de les reprendre.
Tous les jours, Mohamed, comme ses compagnons de fortune, joue au chat et à la souris avec la police pour éviter de se faire arrêter. Interpellations musclées à coups de gaz lacrymogène, déplacements forcés à l’autre bout de la France, tous les moyens sont bons pour les dissuader de rester à Calais. Ici, 530 policiers se consacrent en permanence à la lutte contre l’immigration illégale. Chaque jour, 80 migrants sont interpellés, soit 22 000 personnes par an au total. L’opération coûte cher : plus de deux millions d’euros par an, et les réfugiés affluent toujours.
Aziz est libanais. Comme tous les migrants expulsables arrêtés sur Calais, il a été placé dans le Centre de rétention administrative (CRA) de Coquelles, puis présenté devant un tribunal exclusivement réservé aux étrangers. Une première ! Il a fallu modifier la loi pour que ce tribunal puisse ouvrir en août 2005 à proximité du centre de rétention.
Nous avons suivi les audiences dans ce tribunal où aucun Français ne sera jamais jugé. A raison de dix minutes par audience, les libérations sont rares surtout quand certains étrangers n’ont pas d’avocat. Une pratique qui n’a rien d’exceptionnelle dans ce tribunal. Malgré sa vie précaire et les difficultés rencontrées, Mohamed, comme les autres, rêve toujours d’Angleterre.