Article | Les idées reçues sur Alzheimer : vrai/faux

Face au diagnostic ou à la simple évocation de la maladie d’Alzheimer, il est fréquent de voir surgir une multitude de craintes irrationnelles et de croyances populaires. Ces mythes, souvent ancrés dans l’imaginaire collectif, peuvent retarder une prise en charge adaptée ou générer une anxiété inutile chez les proches et les aidants. 

Il est essentiel de déconstruire ces idées reçues avec rigueur scientifique et humanité pour mieux comprendre la réalité de ce trouble cognitif.

Les pertes de mémoire sont toujours le signe d’un début d’Alzheimer

Il est tout à fait naturel de s’inquiéter lorsque l’on commence à oublier des noms ou l’emplacement de ses clés, mais l’équation n’est pas si simple. Le vieillissement cérébral normal entraîne inévitablement un ralentissement du traitement de l’information et quelques oublis bénins qui ne doivent pas immédiatement alarmer. 

La fatigue, le stress intense, une carence en vitamines ou encore une dépression non traitée peuvent provoquer des troubles mnésiques temporaires qui ressemblent à s’y méprendre aux premiers symptômes d’une démence, sans en être une.

Cependant, la vigilance reste de mise lorsque ces oublis affectent le quotidien de manière significative, comme ne plus savoir utiliser un appareil familier ou se perdre dans un lieu connu. 

C’est grâce aux progrès constants de la recherche médicale, soutenue par des citoyens engagés choisissant de faire un don mensuel, que les spécialistes disposent aujourd’hui d’outils de diagnostic de plus en plus précis pour différencier un simple déclin lié à l’âge d’une véritable pathologie. 

Il est donc crucial de consulter un neurologue ou un gériatre pour lever le doute, car la mémoire n’est pas la seule fonction touchée : le langage et l’orientation sont aussi des indicateurs clés.

La maladie est systématiquement héréditaire

L’une des peurs les plus tenaces réside dans la conviction que si un parent a souffert d’Alzheimer, les enfants sont condamnés à développer la même affection. 

En réalité, les formes purement familiales et génétiques de la maladie sont extrêmement rares, représentant moins de 1 % des cas recensés à travers le monde. 

Dans l’immense majorité des situations, il s’agit de formes dites « sporadiques », résultant d’une interaction complexe entre l’environnement, le mode de vie et le vieillissement biologique.

Bien qu’il existe des facteurs de prédisposition génétique, comme la présence de l’allèle APOE4, posséder ce gène ne signifie pas que le développement de la maladie est une certitude absolue. Cela indique simplement une fragilité accrue face aux processus neurodégénératifs.

 Il est donc primordial de ne pas vivre dans l’angoisse d’une hérédité inéluctable, mais plutôt de se concentrer sur les facteurs de risque modifiables sur lesquels chacun peut agir concrètement au quotidien.

On ne peut rien faire pour prévenir les troubles cognitifs

Le fatalisme est sans doute l’ennemi le plus dangereux dans la lutte contre le déclin cognitif. 

Contrairement à une idée reçue très répandue, le cerveau possède une formidable plasticité et il est possible de construire ce que les experts appellent une réserve cognitive. Adopter une hygiène de vie protectrice peut retarder l’apparition des symptômes, voire prévenir le développement de la maladie chez les personnes à risque.

Les études épidémiologiques confirment régulièrement que « ce qui est bon pour le cœur est bon pour le cerveau ». La gestion de l’hypertension artérielle, du diabète et du cholestérol joue un rôle prépondérant dans la santé neuronale. 

Par ailleurs, l’activité physique régulière, une alimentation de type méditerranéen riche en oméga-3 et antioxydants, ainsi que la stimulation intellectuelle continue, sont des remparts puissants. L’isolement social étant un facteur aggravant, maintenir des liens relationnels denses constitue également une stratégie de prévention active essentielle.

Alzheimer ne touche que les personnes très âgées

Si l’âge reste le principal facteur de risque, avec une prévalence qui augmente fortement après 65 ans, associer exclusivement cette pathologie à la grande vieillesse est une erreur.

Il existe des formes précoces de la maladie qui peuvent se déclarer dès la quarantaine ou la cinquantaine, bouleversant alors la vie de personnes encore pleinement actives professionnellement et socialement.

Ces cas, bien que moins fréquents, posent des défis spécifiques et souvent plus lourds à gérer pour les familles. Le diagnostic est souvent plus long à établir, car les médecins ne pensent pas immédiatement à une cause neurodégénérative chez un patient jeune présentant des troubles du comportement ou des difficultés d’organisation au travail. 

Reconnaître que cette réalité existe permet d’éviter l’errance médicale et d’adapter l’accompagnement psychologique et social aux besoins particuliers de ces patients plus jeunes et de leurs conjoints.

Le malade ne ressent plus rien et ne communique plus

C’est sans doute l’idée reçue la plus douloureuse et la plus fausse. Même à un stade avancé, une personne touchée par la maladie d’Alzheimer conserve une mémoire affective et émotionnelle intacte. 

Si les faits, les dates et les prénoms s’effacent, la capacité à ressentir de la joie, de la peur, du confort ou de l’amour persiste très longtemps. La communication ne se rompt pas, elle se transforme et devient non verbale.

Le toucher, le regard, la musique ou encore les odeurs deviennent des vecteurs de communication privilégiés. Les thérapies sensorielles prouvent chaque jour que l’on peut apaiser l’anxiété et créer des moments de bien-être partagé sans passer par la parole rationnelle. 

Considérer que le malade « n’est plus là » est une erreur qui prive l’aidant et le patient de moments d’échange précieux. L’approche moderne du soin insiste sur le maintien de la dignité et la valorisation des capacités restantes plutôt que sur la focalisation des déficits.