En République démocratique du Congo, la population subit depuis vingt-cinq ans guerres, violences, massacres et viols, dans l’indifférence générale. En 1996, les conséquences du génocide des Tutsi, perpétré par des milices de l’ethnie hutu au Rwanda deux ans auparavant, se répercutent sur l’ex-colonie belge, indépendante depuis 1960. L’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), une coalition composée de militaires ougandais, de Rwandais tutsi et de rebelles zaïrois, intervient contre le gouvernement dictatorial du président Mobutu Sese Seko, qui fut à l’origine en 1971 du changement de nom du pays en Zaïre. L’un des enjeux principaux est la question des réfugiés hutu, parmi lesquels se cachent les leaders du génocide et leurs partisans, qui fuient le Rwanda depuis la reprise du pouvoir par les Tutsi. Jusqu’en 1997, où le leader de l’AFDL, Laurent-Désiré Kabila prend la tête de la nouvellement nommée RDC, de nombreux massacres de civils et de militaires sont commis par les rebelles, provoquant une catastrophe humanitaire. Une fois achevée, la révolution de l’AFDL ne fut pas synonyme de paix ni de stabilité. Dès 1998, à la suite du refus de l’armée rwandaise de quitter le territoire et de la constitution d’un nouveau groupe d’opposition, le Rassemblement congolais pour la démocratie, la deuxième guerre du Congo éclate, d’une violence au moins égale à la première. Pendant tout ce temps, l’ONU essaie d’enquêter sur les exactions commises en RDC. En 2010, le « Rapport Mapping », Un documentaire réalisé par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies (HCDH), inventoriait 617 cas de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis entre 1993 et 2003.

Omerta

Recevant le prix Nobel de la paix à Oslo en 2018, le docteur Denis Mukwege, l’air grave, parle en ces termes de son Congo natal : « Je viens d’un des pays les plus riches de la planète. Pourtant, le peuple de mon pays est parmi les plus pauvres du monde. » Cobalt, or, coltan et autres minerais présents dans son riche sous-sol attisent les convoitises et ont été responsables de bien des désastres. Intervenant dans ce documentaire, Denis Mukwege a ainsi prié son ami Thierry Michel, réalisateur de onze films sur ce pays meurtri, dont celui qu’il a consacré au médecin (L’homme qui répare les femmes – La colère d’Hippocrate), de montrer les bourreaux et les auteurs de ces massacres. À travers ce film-bilan, rythmé d’archives, de témoignages forts d’acteurs de premier plan et d’images chocs, le cinéaste belge souhaite rendre justice à ces quelque 6 millions de morts et sensibiliser l’opinion publique sur tous ces crimes impunis. Témoins, journalistes, réfugiés, responsables d’ONG et des Nations unies, tous l’accompagnent dans cette lourde tâche et contribuent à éclairer les faits pour enfin rompre la loi du silence.

Documentaire de Thierry Michel (Belgique, 2021, 1h50mn)
Disponible jusqu’au 09/03/2024