La réalisatrice enquête sur les réalités d’une Bulgarie communiste qu’elle a quittée enfant. Une odyssée tragi-comique, à mi-chemin entre le film d’espionnage et le roman familial.

Bojina Panayotova a quitté la Bulgarie avec ses parents à l’âge de 8 ans, avant la chute du mur. Elle en a longtemps cultivé le souvenir un peu nostalgique d’une époque communiste idéalisée. En 2014, après vingt-cinq ans passés en France, elle ressent le besoin d’y retourner pour confronter cette mémoire incomplète à la réalité. Mais sa quête menace de tourner à la catastrophe : en venant peu à peu à soupçonner que des membres de sa propre famille ont pu collaborer avec la police secrète, elle convainc ses parents de déposer une requête auprès de la commission spéciale chargée de dévoiler les archives du régime au public…

Exercice de vérité
Je vois rouge évoque la béance à laquelle est confrontée la génération de l’après-communisme, qui n’a pas vécu cette rupture radicale mais en reste tributaire. Car faute d’avoir été mis à distance par la démarche historique, ce bouleversement profond, référence omniprésente et hors d’atteinte des aînés, demeure à l’état de « trou » narratif. Un film inattendu, parfois dérangeant tant Bojina Panayotova, usant de la caméra comme un révélateur, malmène ses interlocuteurs pour leur arracher des réponses. Mais la sincérité, la finesse et l’autodérision du récit tempèrent cette violence inquisitrice. Une odyssée tragi-comique et salutaire, à mi-chemin entre film d’espionnage et roman familial.

Documentaire de Bojina Panayotova.